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Comment accompagner les enfants dans la nature

Comment penser notre façon d’accompagner les enfants dans la nature, que l’on soit d’éducatrice, enseignant ou parent pour que les enfants construisent un lien avec la nature ? 

Cette question, au cœur de nos pratiques, a suscité chez moi de nombreuses interrogations nouvelles ces derniers temps. De façon personnelle, j’ai un lien tellement fort avec la nature depuis l’enfance que je suis entrée dans le monde de l’éducation totalement naïve.

 Après avoir fait le constat du manque de nature chez beaucoup d’enfants que j’accompagnais, j’ai pris la décision de ne travailler plus que pour ça : plus de nature pour tous. Et puis, ces dernières années, j’ai eu la chance de rencontrer différents acteurs de ce monde de l’éducation nature. Ces échanges, les discussions et parfois les désaccords sur le type de pratique, m’ont permis de me remettre en question sur la pertinence de ma façon de faire auprès des enfants et de mon accompagnement des professionnels de l’enfance.

 Quelles sont les pratiques d’animation nature qui favorisent un lien fort à la nature ?

Il ne s’agira ici que des fruits de mon expérience, mes réflexions et rencontres. Nous animons donc ici, à Eveil et Nature, avec quelques principes fondateurs. Ce sont eux qui ont guidé l’expérience vécue avec les enfants des bois ces dernières années. Je vous raconte notre expérience dans la forêt.

1)    Respire !

J’ai un souvenir très précis des premières fois où j’ai accompagné des enfants dans la nature. Comme de mes premiers jours de classe : j’avais prévu tellement d’activités, chants, bricolages,… que j’étais plus en lien avec ma feuille de papier que des enfants qui m’entouraient ! J’avais besoin d’être rassurée et surement un petit sentiment de non-légitimité me titillait. Il me manquait une vision à long terme.

Oser prendre le temps

La raison d’une petite invitation à faire un pas de côté. Quand on projette de passer du temps avec les enfants dans la nature, on a souvent de Grands Projets et Grands Objectifs et de Nombreuses Activités prévues mais… Être dans la nature, s’y sentir bien, cela demande parfois du temps. Comme apprendre à jouer de la musique, lire… Apprendre à être dans la nature nécessite de respecter le rythme de chacun ! Animatrice·eur·s comme enfants prendre ce temps permet de prendre confiance en soi et de développer de bonnes racines. Mes préparations de séances se sont donc beaucoup épurées. Evidemment, j’ai des jeux, activités, chants ou histoires en plus, au cas où en tête mais je sais avant tout une chose : laisser le temps que se tissent les liens demande de laisser à chacun son propre espace, cheminement.

>>>Découvrir la formation « Passeur de Nature », avec de multiples vidéos de nos séances en forêt avec les enfants !

D’ailleurs, certains peuvent déjà avoir un vécu riche dans le milieu naturel, d’autres en sont à leurs premières expériences, d’autres encore sont pétris de peurs ou encore tout feu tout flamme à aller dans tous les sens ! Cela me pousse à bien observer comment se comportent les enfants du groupe pour savoir où se situer. Cela pourrait-être de se mettre plus en retrait, d’être plutôt en mode ‘tutorat’, de commencer par une autre activité que celle prévue, de mettre un cadre encore plus clair et serré (finalement, les limites d’exploration… on va les réduire !!), de rassurer les enfants en faisant une activité un peu anxiogène, d’abandonner une proposition d’activité qui n’intéresse finalement personne… Nous savons tous que la différence entre nos prévisions et la réalité est parfois étonnante !

Un exemple avec des maternelles

C’est ainsi que dernièrement, j’ai pu faire une toute première séance dans un coin de nature avec une classe maternelle. J’ai la chance de faire un bout de chemin avec eux à partir de la rentrée prochaine pour leurs vendredis en nature. J’avais déjà quelques idées en tête pour commencer à la rentrée mais… ce moment partagé m’a orientée un peu différemment. Nous avons remarqué des empreintes de sanglier. L’occasion pour moi de me rendre compte de leur enthousiasme, de leurs connaissances (en faune française mais aussi africaine), du temps de marche d’approche, … Je l’ai désormais en tête !

>>>Connaissez-vous l’Empreintoscope des animaux de la savane ? (outil à télécharger)

C’est dans cet état d’esprit que nous travaillons ici :

  • Du jeu libre pour toutes et tous
  • Des séances adaptables, avec propositions déclinables
  • Le plus possible d’observation de la part des éducatrices

2)    Pour accompagner les enfants dans la nature… Je me connecte sur quelle fréquence ?

 

Si je vous demande ce qui vous vient en tête lorsque je dis « accompagner les enfants dans la nature », peut-être que pour certaines ce sera « jouer dans la boue », pour d’autres « connaître le nom des plantes » ou « méditer dans un coin de nature », « randonner », « faire des abris dans les bois », « faire du vélo sur les chemins »,… ou tout à la fois ! C’est d’ailleurs souvent un savant mélange de plusieurs inspirations qui guide cette réponse. En tout cas, c’est mon profil !

Autant de façons de faire que d’animateur·trice !

Dans les animations à Eveil et Nature, nous sommes 2 animatrices : Emilie et moi. Chacune avec ses propres sensibilités, aspirations et nos points communs. Nous avons construit nos ateliers avec ce qui a construit notre propre lien à la nature. Je suis une inconditionnelle des cabanes, des histoires, j’adore goûter les plantes et apprendre leurs noms, les grands jeux nature,… je vous laisse deviner ce qui guide mon approche ! Je suis moi-même très enthousiaste dans ce genre d’activité et je sens que je le communique aux enfants. En revanche, si on me demande d’animer une (seule) séance pour faire sentir à chacun la connexion aux arbres et aux êtres vivants… cette approche qui résonne moins en moi (je parle de moi – certaines seraient pertinentes ici- pas moi). Je serais probablement mal à l’aise et à côté… Mais je pense avoir trouvé mon chemin.

Lien à la nature… avec une corde !

Cette connexion… me permettez-vous de vous raconter ce que nous avons vécu avec les jeunes aventuriers des bois du mercredi à ce propos? Les enfants du groupe du mercredi ont entre 6 et 11 ans. Emilie et moi avions le projet que chacun puisse identifier un petit coin de forêt où elle·il se sente bien. Un endroit qui serait un lieu de ressourcement, espace d’activité d’écoute… Dans notre projet, nous le décrivions comme une sorte de nid où chaque enfant aurait la possibilité d’être en lien avec son environnement proche. Nous avons commencé par des petits jeux d’écoute, depuis un coin de regroupement. Puis nous les avons invités à partir explorer la forêt à la recherche de cet espace. Après plusieurs séances de tâtonnement, de changement, parfois de querelles de territoires (et oui !), aussi d’aménagement, de piques-niques, différents jeux, nous avons vécu des moments très riches ! Certain·e·s enfants ont vraiment trouvé refuge et se sont ressourcés dans cet endroit. Mais ce n’est finalement pas cette séquence qui nous a permis de vivre le moment collectif le plus fort en termes de connexion avec notre forêt. Cela tenait à… une corde !

Les enfants se mettent à l’affût…

C’est en effet de façon très évolutive et avec les enfants que nous avons construit un nouveau projet : faire un affut. Nous observions régulièrement des traces et indices de présence animale. On en discute, on cherche, on fait des hypothèses. Puis en parallèle, le groupe se prend de passion pour les constructions avec des cordes : nous construisions des toiles d’araignées en hauteur (petite hauteur !). Et si… cela nous permettait d’observer des animaux ? Le projet est lancé : oui, les enfants ont tous eu très envie de faire en sorte d’observer des animaux. Tous se construisent des postes d’observation et on les teste régulièrement : nous nous entraînons à écouter, à observer, à se fondre dans la forêt. Jusqu’au grand soir : nous faisons un affût, à la tombée de la nuit, en forêt. Trente minutes d’observation, d’écoute, chaque groupe dans son poste d’observation. Un pur moment de magie. Un pic-épeiche observé, des craquements de branches, des feuilles qui bougent,… un vrai frisson, sans avoir rencontré le chevreuil tant espéré par certains.

 

En tant qu’animatrice, j’ai eu la chance d’être portée par l’envie collective de vivre ce moment. Si je le propose aux groupes suivants peut-être que ce dispositif ne nous mènera pas au même endroit ! La magie de l’être humain…

Pour conclure

Aujourd’hui, cela fait 22 ans que je suis entrée dans le monde de l’animation et je n’ai toujours pas … de recette magique ! Quelle chance d’être plusieurs acteurs de l’éducation nature avec des approches différentes. Je suis persuadée que nos pratiques sont complémentaires pour accompagner les enfants dans la nature. Même si je me sens plus en lien avec certaines approches, je sais que si elles sont respectueuses de la nature, elles nourriront les enfants.

 Mes convictions reposent sur ce besoin de nature de tous les enfants (et adultes !) : permettons-leur d’aller le plus souvent possible dans la nature, faisons-leur vivre ce qui nous fait vibrer et assurément nous aurons de belles histoires et de grands frissons à nous raconter.

Qu’en pensez-vous ?

Pour discuter avec nous, je vous laisse les commentaires ci-dessous et si vous vous sentez contrariés par nos propos, je vous laisse prendre rendez-vous pour un café papote dans la Drôme !

Bien à vous tous,

 

Valentine.

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Florian
Florian
27 jours il y a

Merci beaucoup pour ce partage ! Quand on voit la diversité d’approches et d’activités qu’il est possible de faire en animation nature, il y a vraiment de quoi s’y perdre ! Cet article me parle beaucoup, animer en fonction de ce qui nous parle nous-même et ce qui nous passionne plutôt qu’essayer de tout faire ou de copier-coller des activités qui ont l’air super mais qui ne nous correspondent pas. Je débute encore en animation nature et j’ai cette tendance à vouloir tout essayer quitte à se perdre un peu, mais c’est peut-être nécessaire pour voir ce qui me plait le plus, je ne sais pas. Je vais essayer d’aller un peu plus vers ce qui me fait vibrer 🙂