Santé

Découvrez pourquoi se salir dans la nature est bon pour la santé des enfants

Bébés-enfants-sales-santé-300x201Certains pensent encore que protéger la santé des enfants passe par aseptiser leur lieu de vie. Nous sommes pourtant de plus en plus nombreux à laisser s’exprimer l’attirance naturelle de nos enfants pour les patouilles forestières et autres gratouilles champêtres… Et les dernières recherches scientifiques sont de notre côté! 

Pour aborder cette question délicate, je fais appel à un expert, Guillaume, ingénieur spécialiste de l’évaluation des risques sanitaires. Grâce à lui, vous aurez désormais des arguments imparables pour répondre à vos parents ou beaux parents qui s’étranglent en voyant les mains sales de vos enfants! 

Vous pouvez écouter le podcast directement sur le blog en cliquant sur le bouton Lecture.  Pour enregistrer le podcast sur votre ordinateur et l’écouter en faisant la vaisselle par exemple, en faisant un clic droit ici, puis Enregistrer le lien sous. 

« Plus on est sale, mieux c’est »  – Scott Sampson

Bonjour à tous

Je suis Guillaume du blog Santé des enfants et environnement. Papa d’une petite fille de 3 ans (et bientôt d’une deuxième !), je m’intéresse au lien entre la santé des enfants et l’environnement. Mon blog a pour objectif de fournir des informations et des recommandations pratiques, permettant de :

  • protéger nos enfants d’un environnement pollué ;
  • les faire profiter des bienfaits d’un environnement naturel.

Je remercie chaleureusement Emilie de me donner l’opportunité de vous écrire un article sur son blog 🙂

Si vous suivez Emilie et le blog Eveil et Nature, vous êtes probablement familiers avec les visages de boue sur les arbres, le jardinage en famille, les temps de jeux libres dans la nature, etc. Vos enfants sont donc régulièrement en contact avec de la terre, des feuilles mortes, des ruisseaux, de la boue, … Bref, avec de la saleté et de nombreux micro-organismes, les « microbes » en langage courant. Bonne nouvelle : le temps passé dans la nature, au contact de ces microbes, apporte de nombreux bienfaits pour la santé des enfants.

Quels sont ces bienfaits ? C’est ce que nous allons approfondir à l’occasion de cet article 😉

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Le temps passé dans la nature, au contact des microbes, apporte de nombreux bienfaits pour la santé des enfants.

Une saleté bénéfique pour la santé des enfants?

Chaque parent le remarque : les jeunes enfants ont une tendance instinctive à porter divers objets à la bouche, augmentant ainsi leur exposition à la saleté. Cet instinct pourrait être hérité des comportements de nos ancêtres préhistoriques : ces comportements, façonnés par des millions d’années d’évolution, leur procuraient un avantage pour la survie et la reproduction, et donc pour la santé notamment.

Et de fait, nos ancêtres :

  • étaient constamment au contact de la saleté naturelle, sans douche quotidienne 😉
  • mangeaient de la terre, tous les jours, car ils ne lavaient ni leurs mains ni leur nourriture.

Porter instinctivement à la bouche des objets sales devrait donc, comme pour nos ancêtres, apporter des bénéfices à la santé de nos enfants. Cette hypothèse peut surprendre tant, depuis le succès des travaux de Pasteur au XIXe siècle, les micro-organismes sont tenus pour responsables de nombreuses maladies.

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« Tiens, je me mangerais bien encore quelques microbes… »

Les microbes seraient nos amis…

Seule une très faible part des microbes connus est effectivement pathogène [1, 2]. Mieux : la plupart des microbes vit dans une relation de symbiose avec le corps humain, c’est-à-dire une relation d’entre-aide mutuelle. Plus les connaissances progressent à leur sujet, plus les microbes sont considérés comme des éléments clés de notre santé [3]. D’ailleurs, la plupart des animaux ont également des relations de symbiose avec des microbes étrangers [4].

Où se trouvent ces micro-organismes ?

Ils sont « sur nous » et « en nous », principalement sur notre peau et dans nos intestins. Une faune abondante et diversifiée (bactéries, champignons, virus) est présente à la surface de notre corps. Cette faune joue un rôle majeur pour la santé de notre peau [5]. Par exemple, elle régule et appuie la réponse immunitaire face à des parasites et des allergènes [5, 6]. Mais il y a plus impressionnant : environ cent mille milliards de micro-organismes [3, 7, 8] peuplent notre système digestif, soit environ dix fois plus de cellules que celles de notre corps. Ces microbes représentent un poids de plusieurs kilos (!) [7, 8]. Ils participent à la digestion des aliments, à la prévention des infections [9]… et même, grâce aux connexions physiologiques entre les intestins et le cerveau [3], à la régulation de nos émotions [10] et de nos potentiels états dépressifs [11].

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Plus les connaissances progressent, plus les microbes sont considérés comme des éléments clés pour notre santé.

Remettons nos enfants en contact avec les microbes!

Comme les adultes, les enfants s’appuient sur des microbes pour être en bonne santé. Plus particulièrement, ils ont principalement besoin des microbes avec lesquels le corps humain sait construire une relation de symbiose, un écosystème local. Mais le contact avec des microbes pathogènes, dans une moindre mesure, a également son utilité : ces microbes constituent une sorte d’ « entrainement » [8] qui renforce le système immunitaire.

Plus précisément, notre système immunitaire se divise en deux parties :

  • le système inné, qui répond automatiquement aux agressions communes : éraflures aux genoux, piqûres d’abeilles, coupures diverses, etc.
  • le système adaptatif qui, comme son nom l’indique, répond de manière spécifique aux microbes pathogènes d’un environnement donné. En y étant exposé régulièrement, le système adaptatif apprend, petit à petit, à reconnaître ces microbes et à y répondre spécifiquement [8]. On parle de « mémoire immunitaire ».

Cet apprentissage est  une étape essentielle chez les jeunes enfants [8], dont le système immunitaire est encore immature. Un des chercheurs les plus connus sur cette thématique, Joel Weinstock, interrogé par le New York Times [12], compare leur système immunitaire à « un ordinateur non programmé, qui a besoin d’instructions ».

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Les enfants s’appuient sur des microbes pour être en bonne santé.

Que se passe-t-il si nos enfants ne sont pas suffisamment en contact avec des microbes ?

Selon la fameuse « hypothèse hygiéniste » [13], les environnements très nettoyés et désinfectés des pays développés, comprenant peu de microbes, seraient responsables de l’augmentation de plusieurs pathologies. Par exemple :

  • les allergies, comme le rhume des foins ou l’eczéma [8, 13, 14, 15] : les systèmes immunitaires des enfants, dont la mémoire est insuffisamment développée et qui ne peuvent pas s’appuyer sur l’aide des microbes, « sur-réagissent » lorsqu’ils sont exposés à certaines substances ;
  • l’asthme [16], qui peut résulter de l’aggravation d’un rhume des foins ;
  • diverses maladies de peau, comme le psoriasis par exemple [17] ;
  • les pathologies liées à une détérioration de la flore bactérienne du système digestif : maladies inflammatoires chroniques de l’intestin [18], maladie de Crohn [19, 20], certains cancers [21], etc.

L’hypothèse hygiéniste a été formulée à la fin des années 1980 [13]. Depuis, de nombreux travaux scientifiques sont venus l’appuyer… mais également la préciser. Cette hypothèse affinée est aujourd’hui appelée l’« hypothèse des vieux amis ». Ces « vieux amis » sont les microbes qui nous sont le plus bénéfiques. Et ils se trouvent principalement… dans la nature !

Que couvre exactement l’hypothèse des vieux amis ? Comment s’appuyer sur cette hypothèse et sur la nature pour augmenter le niveau de santé de nos enfants ? C’est ce que nous approfondirons dans la suite de cet article, que vous pourrez découvrir sur le blog Santé des enfants en environnement. Nous en profiterons pour récapituler les bonnes pratiques que les parents peuvent mettre en place, afin de préserver et de prendre soin de la flore microbienne de leurs enfants.

Pour lire la suite de l’article, cliquez ici.

Et vous, observez-vous de plus en plus d’enfants allergiques ou asthmatiques autour de vous ? Notamment parmi les personnes très strictes sur la propreté ? Peut-être avez-vous déjà réfléchi au niveau d’hygiène que vous souhaitez pour vos enfants : partagez vos retours d’expérience dans les commentaires !   

>Idée d’activité: De Boue les Arbres !

A pleines mains!


Photo par mnd.ctrl, Barry Lenard, GoodiezvanouQuinn Dombrowski 

Références :

  1. Pourcel C. Les bactéries pathogènes : épidémiologie et thérapie par les bactériophages. Jeudi de la recherche 2012 – Faculté des Sciences d’Orsay, Université Paris-Sud – http://www.cvc.u-psud.fr/spip.php?article146
  2. Halimi P. La Grande détox : Comment éviter les poisons du quotidien ? Calmann-Lévy 2015.
  3. Denjean C. Le ventre, notre deuxième cerveau. ARTE France – Inserm, 2013. http://future.arte.tv/fr/le-ventre
  4. Sisson M. Gut Flora and Your Healthy Immune System. http://www.marksdailyapple.com/gut-flora-healthy-immune-system/#axzz3gbtPkdFW
  5. Schommer NN, Gallo RL. Structure and function of the human skin microbiome. Trends Microbiol. 2013 ; 21(12) : 660-8. Doi: 10.1016/j.tim.2013.10.001.
  6. Fyhrquist N, Ruokolainen L, Suomalainen AJ. 1. Acinetobacter species in the skin microbiota protect against allergic sensitization and inflammation. Allergy Clin Immunol. 2014 ; 134(6) : 1301-1309.e11. Doi: 10.1016/j.jaci.2014.07.059.
  7. Bulteau PY. 100 000 milliards de bactéries dans notre intestin : un monde à découvrir ! Conférence donnée pendant l’exposition universelle de Milan – 2015. https://inra-dam-front-resources-cdn.brainsonic.com/ressources/afile/283853-d0fcb-resource-milan-2015-100-000-milliards-de-bacteries-dans-notre-intestin-un-monde-a-decouvrir.html
  8. Ruebush M. Why Dirt Is Good: 5 Ways to Make Germs Your Friends Hardcover. Kaplan Publishing
  9. Hanson LA. Immune effects of the normal gut flora. Monatsschrift Kinderheilkunde 1998 ; 146(1) : S2-S6.
  10. Lowry C, Hollis JH, De Vries A et al. Identification of an Immune-Responsive Mesolimbocortical Serotonergic System: Potential Role in Regulation of Emotional Behavior. Neuroscience 2007 ; 146 (2) : 756–772. Doi:10.1016/j.neuroscience.2007.01.067.
  11. Raison CL, Lowry CA, Rook GAW. Inflammation, Sanitation, and Consternation: Loss of Contact With Coevolved, Tolerogenic Microorganisms and the Pathophysiology and Treatment of Major Depression. Arch Gen Psychiatry. 2010 ; 67(12) : 1211-1224. Doi : 10.1001/archgenpsychiatry.2010.161.
  12. Brody JE. Babies Know: A Little Dirt Is Good for You. Site Internet du New York Times http://www.nytimes.com/2009/01/27/health/27brod.html?_r=0
  13. Strachan DP. Hay fever, hygiene, and household size. BMJ 1989; 299(6710): 1259–1260
  14. Salava A et Lauerma A. Role of the skin microbiome in atopic dermatitis. Clinical and Translational Allergy 2014 ; 4:33.
  15. Baviera G, Leoni MC et Capra L. Microbiota in healthy skin and in atopic eczema. Biomed Res Int. 2014 ; 2014:436921. Doi: 10.1155/2014/436921.
  16. Olszak T, An D, Zeissig S et al. Microbial exposure during early life has persistent effects on natural killer T cell function. Science, 2012 ; 336(6080):489-93. Doi : 10.1126/science.1219328.
  17. Fahlén A, Engstrand L, Baker BS et al. Comparison of bacterial microbiota in skin biopsies from normal and psoriatic skin. Arch Dermatol Res. 2012 ; 304(1) : 15-22. Doi: 10.1007/s00403-011-1189-x.
  18. Swidsinski A et al. Mucosal flora in inflammatory bowel disease. Gastroenterology 2002 ; 122 : 44–54.
  19. Manichanh C et al. Reduced diversity of faecal microbiota in Crohn’s disease revealed by a metagenomic approach. Gut 2006 ; 55 : 205–11.
  20. Vasquez N et al. Patchy distribution of mucosal lesions in ileal Crohn’s disease is not linked to differences in the dominant mucosa-associated bacteria: A study using fluorescence in situ hybridization and temporal temperature gradient gel electrophoresis. Inflammatory Bowel Diseases 2007 ; 13 : 684–692.
  21. Sobhani I et al. Microbial Dysbiosis in Colorectal Cancer (CRC) Patients. PLoS ONE 2011 ; 6, e16393.

(Jingle du podcast: source sonore: www.universal-soundbank.com, Chant d’oiseaux variés et Senegal – inst : Tambours – Voix)

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vanessa
vanessa
6 années il y a

Bonjour, moi je me demande, lorsque l’on a accès que à la « nature de la ville » si on peut faire la même chose, c a d laisser trainer l’enfant dans la boue mettre à la bouche etc…car il y a des saleté partout, des mégots, des chiens qui font leur besoins partout on l’on va… Comment permettre à l’enfant de cotoyer la nature et ses microbes sainement?
merci !

Emilie
6 années il y a
Répondre à  vanessa

Question importante en effet… Il n’est bien sûr pas souhaitable de laisser un enfant se salir avec des déjections et autres insanités!
2 éléments de réponse me viennent:
1) Choisir les endroits où l’on laisse nos enfants patouiller, exempts de pollutions;
2) Rejoindre ou créer des collectifs dans le but de se réapproprier des espaces publics, soit pour y créer des jardins partagés, même petits, des parcs pour enfants co-aménagés avec les riverains, etc. Bref, donner un autre visage à nos quartiers! De tels projets sont en route sur ma commune et un peu partout… à nous de leur donner de l’élan!

Mamiherison
Mamiherison
6 années il y a

Bonjour, merci pour ces échanges très instructives. Je suis très sensible, et j’y réfléchis constamment, au problèmes de surpoids et d’allergie asmatique. Je pense que l’approche « multifactorielle » des deux et les solutions qui se proposent contribuent à avancer dans le bon sens: Donc, cette promotion du reprise de contact globale, avec les flores bactériennes, interne et externe pathogènes est une piste à explorer.
Merci.

Guillaume
7 années il y a

Hello Magalie
Je suis ravi de lire que cet article a contribué à nourrir tes réflexions sur le sujet 🙂 Il me semble que si l’objet vient du sol d’un environnement naturel, l’influence sur les enfants est très différente par rapport au sol d’un environnement urbanisé : rue, intérieur de bâtiments, etc. J’ai des reflexes assez proches des tiens quand l’objet a bien trainé sur le trottoir 😉
J’imagine que l’expérience d’Emilie te sera utile. personnellement, quand les enjeux ne sont pas critiques comme ici, j’essaye de laisser mes filles faire leur expérience, et je me base sur leur non-verbal pour intuiter quand cela devient désagréable pour elles.

Magalie
Magalie
7 années il y a

Bonjour Guillaume et Emilie,

Merci pour cet article. En le lisant je me rends compte à quel point je tiens ma fille à l’écart de cette nature qui est tout de même essentielle pour elle. Ce n’est pas tellement par peur de la maladie – même si je l’avoue, je lui enlève facilement tout ce qu’elle veut porter à la bouche et qui viendrait du sol- mais surtout car j’ai toujours l’impression qu’elle a froid ou trop chaud ou qu’elle est trop au soleil ou pas assez ou dans le vent, etc. Depuis quelques jours, nous avons de belles journées automnales ensoleillées et je ne l’ai pas sortie une fois dans notre jardin. Elle ne sort qu’en poussette ou porte-bébé. C’est peut-être plus simple quand ils marchent; à 10 mois elle est assise et rampe donc en contact direct avec l’herbe mouillée et fraîche… mais à voir la photo du bébé en polaire bleu, cela semble possible!!

ould mohamed candy
ould mohamed candy
8 années il y a

merci pour tout je suis fan de larticle <3 et fan des activité ou babychou rentre tout cracra je me dis qu il s est bien amusé 🙂

Guillaume
8 années il y a
Répondre à  ould mohamed candy

merci 🙂

Depuis que j’ai fait des recherches pour cet article, je crois que moi aussi je rentre plus souvent « tout cracra » à la maison haha
Ce qui, à la réflexion, est aussi un bon moyen de faire comprendre à ma fille que cet « état » est tout à fait « naturel » 😉

Emilie
8 années il y a
Répondre à  Guillaume

C’est vrai, ça, on aurait du mettre aussi des photos de parents cracras qui rentrent de balade… des photos de nous! 😉

Guillaume
8 années il y a
Répondre à  Emilie

Pour moi c’est toi la reine des belles photos : je te laisse ouvrir le bal haha